La contestation des actes réglementaires : précisions du Conseil d’Etat
Par deux arrêts du 18 mai 2018, n°414583 et 411045, le Conseil d’Etat, dans sa formation la plus solennelle, est venu préciser les modalités selon lesquelles un acte réglementaire peut être contesté.
Le Conseil d’Etat a rejeté le recours introduit par la CFDT à l’encontre d’un refus d’abroger un décret du 29 mars 2017 fixant la liste des emplois et types d’emplois des établissements publics administratifs de l’Etat prévue au 2° de l’article 3 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’Etat en tant qu’il détermine la liste des emplois pour lesquels l’Institut national de la propriété industrielle (INPI).
La CFDT invoquait deux moyens de légalité externe contre le décret, lesquels sont écartés par le Conseil d’Etat après formulation d’un nouveau principe selon lequel les vices de forme et de procédure ne peuvent être invoqués contre un acte règlementaire après l’expiration du délai de recours contentieux.
Le Conseil d’Etat rappelle que toute personne qui justifie d’un intérêt pour agir peut demander au juge administratif l’annulation pour excès de pouvoir d’un acte réglementaire, dans les deux mois qui suivent sa publication. Dans le cadre d’un tel recours, le juge contrôle la compétence de l’auteur de l’acte, les conditions de forme et de procédure dans lesquelles il a été édicté, l’existence d’un détournement de pouvoir et la légalité des règles générales et impersonnelles qu’il énonce.
Lorsque le délai de recours est expiré, deux autres moyens permettent de contester à tout moment un acte réglementaire :
- La voie de l’exception : à l’occasion d’un recours contre une décision qui trouve son fondement ou a été prise pour l’application de cet acte réglementaire ;
- La demande d’abrogation de l’acte réglementaire, c’est-à-dire d’y mettre fin pour l’avenir et, dans l’hypothèse d’un refus, de contester ce refus devant le juge.
Or, dans les deux arrêté précités, le conseil d’Etat précise que les vices de forme et de procédure dont serait entaché un acte règlementaire ne peuvent plus être invoqués dans le cadre d’un recours en annulation contre la décision de refus d’abroger l’acte réglementaire ou par voie d’exception.
Le Conseil d’Etat renforce ainsi le principe de sécurité juridique, ce qui est devenu assez prégnant dans la jurisprudence récente (par exemple la jurisprudence Danthony, l’arrêt commune Saint-Bon-Tarentaise…).
A noter toutefois qu’en matière d’urbanisme, l’article L.600-1 du code de l’urbanisme prévoit que l’illégalité pour vice de forme ou de procédure d’un document d’urbanisme ne peut être invoquée par voie d’exception après l’expiration d’un délai de six mois à compter de la prise d’effet du document en cause.